J’ai à peu prés oublié la moitié des choses que j’ai apprise pendant mes études de kinésithérapie et la moitié des choses apprises sont dépassées. Pour se consoler, on peut toujours lire le rapport de L ́ HAS (Haute Autorité de Santé) qui indique que la kinésithérapie respiratoire pour les enfants de moins d’1 an atteint de bronchiolite n’est plus indiqué, voire dangereuse, seulement inefficace ou les deux.
Le rapport est assez flou pour générer des confusions en particulier dans la presse suscitant des titres accrocheurs du style : « La fin de la Kiné respiratoire pour traiter les bronchiolites ». Lʼabsence d’étude scientifique sur les techniques de désencombrement du nourrisson est un des arguments de la Haute Commission pour justifier ces conclusions. Mais c’est aussi une opportunité à saisir pour nous kinésithérapeutes et ainsi prouver le contraire. La comparaison, ou plutôt l’absence de Kiné respiratoire pour les nouveaux nés dans les autres pays est noté également dans le rapport de HAS comme pièce à charge.
La France est un des seuls en Europe à pratiquer cette technique d’accélération du flux expiratoire pour aider nos bébés a mieux respirer. Serait-ce dû à l’obstination coupable de nos kinésithérapeutes ou bien à une réalité plus sociologique ? Dans notre pays les nouveaux nés sont très tôt en collectivités favorisant ainsi la transmission des germes, le VRS responsable de la bronchiolite étant très contagieux, les épidémies hivernales frappent souvent la France et une des réponses a été de développer la kinésithérapie respiratoire. Le drainage postural, vibration et clapping font partie du contingent oublié de mes études, ces techniques complètement dépassées sont pourtant évoquées par HAS et viennent discréditer un peu plus la kinésithérapie respiratoire. L’accélération du flux expiratoire qui a depuis longtemps remplacé les autres, doit être modérée voire douce selon les recommandations de l’HAS et de toute façon pas en milieu hospitalier plus précisément sur des bébés fragiles ayant une bronchiolite aiguë.
Je n’ai pas oublié mes années de pratique à l’hôpital St Vincent de Paul à Paris, les nourrissons très fragiles en détresse respiratoire, les services de réanimations, les grands prématurés et nous kinésithérapeutes auprès d’eux répondant aux demandes présentes des médecins pédiatres, réanimateurs ou chefs de services, nos techniques étaient douces et modérées adaptées à la fragilité de ces tout petits patients. Elles amélioraient leurs états, certes de façon transitoire mais toujours significative. Un des signes de la détresse respiratoire est nommé signe de lutte, pour capter de l’oxygène le bébé va véritablement combattre augmentant sa fréquence respiratoire, lʼouverture des ailes du nez, contracté les muscles inspirateurs accessoires (SCM), creusé la cage thoracique.
Dans ce contexte très impressionnant, la kinésithérapie est très utile en dégageant les voies ariennes supérieures, en accélérant le flux expiratoire pour permettre une meilleure ventilation des bronches. Les résultats cliniques et biologiques en attestent. Mais cependant l’HAS face à la demande de soins qui ne cesse de croître en période hivernale et la demande de réactualisation des soins de la part des médecins et pédiatres , propose des recommandations qui passent par la remise en question de la kinésithérapie respiratoire pour les cas les plus graves. On peut penser que les rédacteurs de ce rapport n’ont jamais vu de bébés atteints de bronchiolite avant et après une séance de kinésithérapie respiratoire. Ou peut être devant la fragilité de ces nourrissons et le risque d’ aggravation pendant les séances, les sages de cette commission préfèrent invoquer le principe de précaution. Nous devons les rassurer, le kinésithérapeute que se soit en milieu hospitalier ou en ville n’improvise jamais sa pratique, son expertise est essentielle pour gérer au mieux cette crise aiguë que traverse le nourrisson.