La grossesse dans tous ses états
Au début comment incriminer la prise de poids, pour expliquer ces douleurs dorsales, elle vient comme d’ habitude consulter et ses doléances ne sont pas très éloignées de ses dernières visites, en apparence rien n’a changé .En réalité tout son corps est en train de se transformer, elle est enceinte de 7 semaines. Si elle ne le dit pas, personne ne peut s’en douter, même pas moi qui pourtant pose mes mains sur son ventre et observe sa posture. Pourtant quelque chose à changer à y regarder de plus prés, plus exactement en palpant, en touchant, on s’aperçoit que les articulations du rachis cervical au bassin sont moins denses et donnent une impression de souplesse.
Peut -être que mes mains sont influencées par l’association que je peux faire entre grossesse et imprégnation hormonale, avec un pic de relaxine circulante dès le début. Cette hormone a en autres des propriétés relaxantes sur les muscles et les ligaments, pour détendre les sacro-iliaques et la symphyse pubienne. Elle est secrétée dés les premières semaines car elle intervient dans la croissance de l’embryon. Les premiers symptômes observés puis décrits par la patiente lors du premier trimestre, intéressent le haut du dos : cervicalgie, maux de tête et de dos irradiant vers les côtes .l’action myorelaxante de la relaxine agit sur le rachis dans son ensemble et le rend plus sensible à la gravité. Pour soulager ces douleurs ont traitera en particulier les vertèbres qui veillent sur la posture, les charnières anatomiques et fonctionnelles (C7-T1, D3-D4, T9-T10) en s’assurant de leurs bonnes mobilités qualitatives et quantitatives. Tout au long de la grossesse on veillera à stabiliser cette colonne vertébrale. En utilisant toute la gamme des corrections ostéopathiques, le praticien s’adaptera aux différents états des articulations d’une femme enceinte, qui vont de l’hyper mobilité à la mobilité restreinte. Pendant ce premier trimestre, la patiente pourra être traitée assise ou sur le dos, la position sur le ventre ne sera utilisée qu’exceptionnellement.
Le ventre s’arrondi en même temps que le dos se creuse, le sacrum s’horizontalise, les douleurs suivent le centre de gravité, elles descendent, elles s’installent dans la région lombo-sacrée mais elles n’ont pas abandonné le haut du dos, elles peuvent résister. C’est le deuxième trimestre, peut- être le plus délicat, l’utérus augmente en volume vers le haut provoquant des troubles digestifs RGO ; vers le bas, pousse le ventre en avant et écrase la 5ème lombaire. Les lignes de force de la colonne vertébrale évoluent avec la nouvelle posture et semblent être à l’origine des douleurs qui ne quittent pratiquement plus ma patiente, qu’elle soit allongée ou debout. Ces transformations vont entrainer des troubles fonctionnels ou augmenter l’intensité des douleurs préexistantes.
Elle aimerait pouvoir apprécier ce moment où son corps se transforme franchement pour laisser grandir son bébé qui commence à se manifester. Assise, elle me fait part de ses angoisses pour les derniers mois, la peur d’avoir ne plus en plus mal .Tout en lui parlant je progresse par petites touches sur les points sensibles de sa colonne, les mots viennent tout seul pour la rassurer, le geste à la parole. Ce traitement qui consiste à créer des leviers sur les vertèbres pour les mobiliser avec précision, s’ajuste parfaitement à la réalité lésionnelle de la colonne d’une femme enceinte. La séance se poursuit la patiente est allongée sur le dos, la tète servira de levier pour mobiliser la dure mère jusqu’au coccyx. La base du crâne libérée, amorcera le travail sur l’estomac pour diminuer les conséquences de l’ascension du cardia et lutter contre le RGO.
Les derniers mois, c’est le temps des douleurs référées de type sciatalgie, à la palpation les ligaments sacro iliaque et les ligaments sacro-sciatique sont très sensibles. Ils sont à l’origine de la plupart des douleurs aigues de fin de grossesse. Ces points triggers situés tout au long du sacrum sont à traiter en effectuant des ponçages, puis en trouvant le rythme qui permettra la libération des tensions. Pour inhiber ces points douloureux, en réalité il faut une implication totale et coordonnée des doigts avec des petites poussées dans les trois dimensions, conditions nécessaires pour ralentir le message nociceptif en faisant décharger les mécano-récepteurs (type GOLGI).
Un soignant aux mains nues, c’est peut être limité mais c’est d’une grande utilité quand on ne peut pas administrer de médicament (sauf la cortisone dans des cas très douloureux et de toute façon limité dans le temps). Quand on regarde travailler un ostéopathe pour soulager une femme enceinte, on peut se demander ce qu’il fait réellement tant les mouvements sont économes, loin des images du praticien affairé à traiter une lombo-sciatique. Là, la patiente est assise et ne bougera plus l’ostéopathe posera ses mains sur son bassin, de temps en temps une main contrôlera les épaules, pendant que les pouces masseront les fossettes iliaques. Cette simplicité apparente de traitement est souvent un gage de réussite, tant l’origine des ses douleurs en fin de grossesse se limitent au tissu de soutien du bassin. Cette période n’en est pas moins douloureuse et nécessite un accompagnement jusqu’à l’accouchement ; ensuite dans la grande majorité des cas tous les symptômes disparaîtront.
Peut-on prévenir ces maux de dos ? Cette question posée en fin de traitement quelques jours avant d’accoucher m’a permis de lui dire qu’une visite chez l’ostéopathe avant l’installation de la grossesse peut prévenir ce syndrome douloureux pelvien ; en rééquilibrant le bassin dans sa fonction de transmission des contraintes .